2024-09-17 CMQ Plan EAU

Plan national de l’eau : le fruit d’une concertation qui nous engage dans une bonne direction

17 septembre 2024

Québec, le 17 septembre 2024 – Fondation Rivières et Eau Secours accueillent favorablement le dépôt du Plan national de l’eau du Québec présenté aujourd’hui par le ministre de l’Environnement Benoit Charette. Les groupes soulignent notamment que  l’apport du Fonds Bleu annoncé plus tôt dans l’année permet maintenant la mise en place de mesures favorisant la participation des citoyens et des OBNL dans la protection de l’eau et une juste collaboration entre les acteurs de la société civile et les ministères concernés par la protection de l’eau. Cependant, les organisations estiment que le Plan mise essentiellement sur la sensibilisation et l’accompagnement des acteurs en passant sous silence les lacunes du ministère dans l’application de la réglementation environnementale. De plus, elles déplorent la faiblesse des indicateurs de résultats qui accompagnent  certaines des mesures présentées. 

Se donner les moyens de ses ambitions

Avec le Plan national de l’eau, le deuxième plan découlant de la Stratégie québécoise de l’eau 2018-2030 – le premier étant échu depuis 2023, le MELCCFP s’est doté d’un outil pour mettre en œuvre les mesures et objectifs élaborés. Le Fonds Bleu prévu à ce plan s’ajoute aux montants déjà prévus pour l’environnement dans d’autres enveloppes qui permettront de mettre en place des actions qui contribuent à l’innovation sociale, la mobilisation, la sensibilisation et l’éducation dans le domaine de l’eau.

« Nous constatons l’ajout des organisations de la société civile à différents niveaux dans le plan d’action ce qui est une excellente nouvelle. Par contre, nous soulignons également l’importance que les autres acteurs, pour la plupart présents au Forum d’action sur l’eau, se responsabilisent à l’égard de la protection de l’eau telles les industries, les commerces et institutions. » précise Rébecca Pétrin, directrice générale d’Eau Secours. 

De plus, les organisations soulignent les efforts mis en place pour s’assurer de la complémentarité du Plan avec d’autres initiatives gouvernementales, comme le Plan de protection du territoire face aux inondations, le Plan pour une économie verte et le Plan de mise en oeuvre de la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire. Soulignons la somme de 37,8 M$ accordée pour soutenir à la mise en œuvre des plans régionaux des milieux humides et hydriques.

Consultation bénéfique même si limitée

Selon les deux organisations, la participation au Forum d’action sur l’eau de nombreux acteurs de l’eau de la société civile du Québec a permis de bien identifier les problématiques et de faire connaître les préoccupations aux responsables au sein du gouvernement. 

« Le Forum d’action sur l’eau a permis un gain d’efficacité considérable dans nos différentes démarches. Des canaux de communication ont été ouverts et cela a permis de développer une meilleure compréhension des modes de collaboration possibles entre les représentants du gouvernement et les acteurs de la société civile dans la protection de l’eau et de faire progresser plusieurs dossiers, » selon André Bélanger, directeur général de Fondation Rivières. 

Les discussions se sont limitées à l’élaboration de mesures incitatives sans porter sur un pan fondamental du rôle de l’État, soit celui d’appliquer correctement la réglementation.  Les organisations craignent que certains volets du plan mènent à des résultats décevants si l’accompagnement n’est pas accompagné de contraintes. 

Des indicateurs déficients 

Le Commissaire au développement durable avait critiqué sévèrement l’absence d’indicateurs dans son audit réalisé en 2020 et, malheureusement, plusieurs indicateurs servant à évaluer le succès des mesures mises en place dans le plan sont insuffisants. À titre d’exemple, l’indicateur d’impact de la mesure 1.2 de 80 M$ visant à  « Soutenir les municipalités dans la mise aux normes d’installations individuelles pour les eaux usées et l’eau potable » se limite à s’assurer que: « le gouvernement a soutenu financièrement les municipalités dans la mise aux normes des installations individuelles pour les eaux usées et l’eau potable ».

« Nous avons rappelé l’an dernier ce problème en commission parlementaire et on espère que le Forum d’action poursuivra son travail pour établir des indicateurs fiables et convaincants et s’assurer que les mesures améliorent réellement la qualité et la quantité de l’eau au Québec. » plaide M. Bélanger.

Des éléphants dans le plan

Certaines des cibles stratégiques fixées par la Stratégie québécoise de l’eau 2030 ne pourront toutefois pas être atteintes, malgré les nouvelles mesures. C’est le cas avec  l’engagement de zéro perte nette de milieux humides au Québec depuis l’adoption de la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques en 2017. La mesure 2.2 du plan qui vise à « Renforcer la capacité de restauration et de création des milieux humides et hydriques » est futile tant et aussi longtemps que le gouvernement continue à autoriser leur destruction. 

Même chose en ce qui a trait à la cible 2030 qui prévoit que « toutes les municipalités régionales de comté (MRC) tiennent compte des plans directeurs de l’eau (PDE) dans leurs outils de planification du territoire. » Les MRC n’en tiennent toujours pas compte ce qui nuit grandement à l’efficacité de la gestion par bassin versant. 

« Il faut profiter de la mise en place de ce nouveau plan pour aborder l’éléphant dans la pièce, c’est-à-dire que tant et aussi longtemps que la préservation des milieux naturels passe au second plan pour nos gouvernements, les gains des plans et mesures instaurés seront toujours restreints, » de conclure Mme Pétrin. 

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Pour plus d’informations

Mathieu Langlois
Responsable des communications, Eau Secours
514-588-5608
communications@eausecours.org

Yannick B. Gélinas
Responsable des communications, Fondation Rivières
514-272-2666, poste 307
yannick.gelinas@fondationrivieres.org

 

Solution 1: Augmenter davantage les redevances sur l’eau pour les industries

En juin 2023, le gouvernement du Québec a adopté la Loi instituant le Fonds bleu et modifiant d’autres dispositions. Cette loi visait, entre autres, à augmenter les redevances sur l’eau et à réduire le seuil de déclaration des prélèvements ainsi qu’à rendre publiques les données de prélèvement d’eau par les industries. C’était une excellente nouvelle pour nous qui luttons depuis plusieurs années pour ces modifications essentielles. 

Cependant, le gouvernement n’est pas allé assez loin. Le coût de la redevance pour certains secteurs industriels est à seulement 35$ pour 1 million de litres d’eau, ce qui est loin d’accomplir l’objectif visé de dissuader la surconsommation. Le gouvernement a même le pouvoir de réduire les quantités autorisées à être prélevées dans les permis d’autorisation directement.  En souhaitant épargner les richissimes industries consommatrices d’eau, non seulement le gouvernement se prive d’un revenu pouvant être réinvesti dans la protection de l’eau, mais il perpétue le mythe que l’eau du Québec n’a que peu de valeur et que c’est le bar ouvert au Québec pour l’industrie.

Solution 2: Réduire le seuil de déclaration des prélèvements

La nouvelle loi de juin dernier a fait passer le seuil de déclaration des prélèvements d’eau de 75000 à 50000 litres par jour. Avec cette modification, seulement environ 1,5% des entreprises du Québec s’ajoutent aux entreprises devant déclarer leurs prélèvements. Ce n’est clairement pas suffisant pour avoir un portrait complet de la consommation d’eau dans la province. Eau Secours continuera de militer pour que le seuil de déclaration soit abaissé à 20 000 litres d’eau prélevés par jour.

Soutenir l’eau municipale

Solution 3: Bannir les petites bouteilles d’eau à usage unique

Lors de l’adoption de la Loi instituant le Fonds bleu et modifiant d’autres dispositions, le ministre de l’Environnement M. Benoit Charette, s’est engagé à bannir les petites bouteilles d’eau jetables qui sont remplies à même les aqueducs municipaux. C’est un excellent engagement, mais nous attendons toujours sa mise en œuvre. Nous militerons pour que cette mesure s’applique le plus largement possible afin de réduire le plus de pollution par le plastique et de gaspillage d’eau. 

Solution 4: Investir davantage dans nos infrastructures d’eau

Nos infrastructures d’eau publiques font bien des jaloux dans le monde entier, et avec raison puisqu’elles sont indispensables à une distribution juste et équitable d’eau potable dans la population. Mais elles ont besoin de beaucoup d’amour, notamment pour affronter les défis de la crise climatique. Plus précisément, un investissement d’amour équivalent à environ 35 milliards de dollars est nécessaire selon Réseau Environnement afin d’assurer leur entretien et réparation. 

Solution 5: Interdire, dans toute la province, l’arrosage de la pelouse

Plusieurs municipalités ont déjà interdit ou grandement limité l’arrosage des pelouses avec de l’eau potable. Ces mesures doivent être appliquées à la grandeur de la province et nous devons nous questionner sur la façon d’aménager nos espaces de vie extérieur. Le traitement de l’eau potable coûte des millions de dollars aux municipalités et aux contribuables. Dans certaines villes, la portion de la consommation d’eau vouée à l’arrosage de pelouse monte à 30% de la consommation totale pendant l’été. C’est ridicule! Des mesures pour inciter la mise en place d’aménagements servant à capter l’eau des épisodes de pluies violentes pour remplacer les pelouses pourraient être mises en place. Restez à l’affût, nous préparons quelque chose pour cet été 😉

Prioriser l’accès à l’eau potable avant le développement économique

Solution 6: Exiger des infrastructures vertes dans tous les nouveaux projets de développement

Le gouvernement peut exiger que les nouveaux projets développés dans la province incluent automatiquement des infrastructures vertes pour mieux affronter les réalités de la crise climatique et réduire l’impact sur l’environnement. Par exemple, Québec aurait pu exiger à Northvolt de construire une usine éponge qui éviterait le ruissellement des eaux de pluie, tel que suggéré par Fondation Rivières. Et que dire du tout nouvel hôpital à Vaudreuil qui se voit retirer son stationnement à étages pour être remplacé par un stationnement classique, soit une très grande étendue de bitume imperméable.

Solution 7: Analyser la capacité des bassins versants avant d’autoriser un projet exigeant en eau

L’impact sur l’eau des nouveaux projets commerciaux et industriels est rarement pris en considération, alors que c’est l’objectif de la gestion intégrée par bassin versant mis en place par la Politique nationale de l’eau. Pensons notamment à Northvolt qui s’implantera dans une région agricole et qui utilisera des quantités inconnues d’eau.

Et ça continue! 

Ces solutions ne sont que quelques pistes d’actions possibles dès maintenant sur lesquelles nous travaillons. Pour nous, tous les jours est une journée mondiale de l’eau – La lutte continue!

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