18 juillet 2024
Québec – 18 juillet 2024. Publiant son analyse détaillée du projet de loi modifiant la Loi sur les mines, la Coalition QMM constate avec déception l’absence de plusieurs mesures phares demandées par la population de même que la présence de plusieurs reculs inquiétants et appelle en conséquence l’Assemblée nationale à opérer une profonde révision du projet de loi 63. Le projet de loi comprend certaines avancées, mais beaucoup trop de demi-mesures ou de mesures carrément problématiques pour être appuyé dans sa forme actuelle. Plusieurs réformes cruciales, notamment environnementales et sociales, ont été ignorées. À peine 5 des 50 recommandations législatives soumises par la Coalition QMM lors des consultations du printemps 2023 sont partiellement présentes. De surcroît, les six mesures prioritaires de la Coalition QMM ont carrément été écartées et doivent impérativement être ajoutées sans quoi l’exercice ratera sa cible et sa raison d’être :
- Consentement des populations avant l’émission des droits miniers
- La fin de la préséance des droits miniers sur la protection de l’eau, de l’environnement, des aires à protéger et des populations
- Un mécanisme efficace de retrait des claims miniers incompatibles avec les autres usages du territoire
- Une obligation légale de restaurer les mines abandonnées d’ici 10 ans
- La fin de l’autorégulation du secteur minier
- L’obligation de retourner les déchets miniers dans les fosses et autres excavations
BAPE pour tous nouveaux projets miniers
Parmi les mesures bienvenues, la Coalition QMM souligne l’assujettissement de tous les nouveaux projets d’exploitation minière à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement menant au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), une demande qui remonte à l’origine de la Coalition QMM il y a 16 ans. La porte reste toutefois grande ouverte pour de nombreux projets d’agrandissement de mine qui continueront d’échapper aux évaluations environnementales et au BAPE.
Mesures anti-spéculation insuffisantes, reculs et dangers en matière de restauration minière
La Coalition QMM constate l’intention du gouvernement d’endiguer la spéculation minière, mais ses mesures pour y parvenir seront insuffisantes pour contrôler le boom minier et retireront des droits aux citoyen-ne-s de protéger adéquatement leurs milieux. La soustraction des terres privées et périmètres d’urbanisation à l’activité minière est une mesure intéressante, mais n’aura qu’un effet limité alors que 92% du territoire de la province se trouve en terres publiques.
Les nombreuses dispositions visant à favoriser la valorisation des résidus miniers doivent être considérées comme préoccupantes tant qu’un régime législatif et réglementaire environnemental strict et dédié à ce secteur n’est pas adopté. L’avenue du recyclage des résidus miniers pouvant contenir des contaminants et autres substances toxiques deviendra réellement intéressante le jour où un plan de réduction de l’empreinte minérale sera mis en place pour éviter et réduire concrètement l’extraction des minéraux vierges. Plusieurs sites miniers nécessitent des suivis s’étalant sur plusieurs décennies. Il est donc crucial de retirer la limite de 15 ans (suivant la date où la ou le ministre se déclare « satisfait » des travaux) au suivi environnemental des travaux de réaménagement des sites détruits par l’activité minière. Sinon la facture et le fardeau d’entretien seront refilés au gouvernement, donc aux contribuables.
Reprise des travaux à l’automne
Le projet de loi ne débutera vraisemblablement pas son étude en commission parlementaire avant le mois de septembre. D’ici-là, la Coalition QMM tirera avantage de l’été pour informer et soutenir la préparation des organisations et partis politiques désirant améliorer l’encadrement minier pour le bien de l’environnement et des gens. Des suggestions concrètes d’amendements au projet de loi seront soumises aux parlementaires et des séances d’information gratuites et publiques sur le sujet seront offertes durant le mois d’août.
Un rehaussement important de l’ambition et des mesures concrètes de ce projet de loi sont nécessaires afin d’éviter de favoriser les intérêts de l’industrie et de donner une fausse impression que l’exercice aura réglé les enjeux de fonds qui demeurent.
Rappel contextuel
Publié le 5 octobre 2023, le Rapport des consultations du Ministère des Ressources naturelles et des Forêts réalisées au printemps 2023 était sans équivoque : la population demandait une réforme ambitieuse de l’encadrement minier respectant réellement les droits des peuples autochtones et des citoyen-ne-s, la protection de l’environnement et le consentement des populations locales. Suite au dépôt de ce rapport, la Coalition QMM avait souligné l’intention de la Ministre de rouvrir la Loi sur les mines à condition que ça ne se fasse pas au détriment de la nature et des gens.
L’exercice de réforme de la Loi sur les mines ne doit donc pas servir les intérêts de l’industrie minière, mais réellement répondre aux demandes légitimes et bien-fondées de la population. Les gens ne souhaitent pas voir plus de mines, mais bien de réduire à la source notre dépendance aux minéraux, de resserrer les processus d’évaluation environnementale des projets miniers, de réformer en profondeur le système des claims miniers et de tenir les minières responsables pour leurs atteintes à l’environnement.
Citations :
« En écartant en grande partie les priorités de la population de sa réforme minière, le gouvernement prend une direction contre-productive. Nous attendons un changement de cap et une révision majeure du projet de loi durant l’été afin de répondre aux demandes des gens et pour le bien de l’environnement », Rodrigue Turgeon, avocat, co-porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine et coresponsable de MiningWatch Canada
« Sans une révision majeure du projet de loi, la Loi sur les mines maintient injustement sa préséance sur la protection de l’eau et mènera indéniablement à des conséquences désastreuses pour cette ressource des plus vitales. La destruction totale de lacs pour y stocker des déchets miniers en est un exemple foudroyant parmi trop », Émile Cloutier-Brassard, responsable des dossiers miniers d’Eau Secours
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Source : Coalition Québec meilleure mine
Références :
- Analyse de la Coalition QMM du projet de loi 63 (18 juillet 2024)
- Projet de loi modifiant la loi sur les mines (28 mai 2024)
- Mémoire de la Coalition QMM sur l’encadrement minier (18 mai 2023)
- Rapport des consultations du MRNF (5 octobre 2023)
Pour information:
- Me Rodrigue Turgeon, Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada, 819-444-9226, rodrigue@miningwatch.ca
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