Le Québec regorge de plans d’eau! Cependant, comment se fait-il que la population ait de plus en plus de difficulté à y accéder? André Bélanger, directeur général de la Fondation Rivières, explique que plus on s’approche des grands centres, plus il est difficile de trouver un accès public à un plan d’eau. Il faut savoir que les plans d’eau et leurs berges sont publics, et donc théoriquement accessibles à toutes et tous, mais le paradoxe se trouve dans la possibilité de restreindre l’accès en privatisant tous les terrains autour de l’étendue d’eau. Cette situation fait en sorte que la majorité des accès sont devenus privés, là exactement, où se trouvent la majorité des personnes désirant accéder à l’eau. Ce phénomène est parfois déclenché par un désir de protection des plans d’eau par des municipalités qui voient l’affluence augmenter. L’objectif est souvent de protéger les écosystèmes et de favoriser l’accès à leur résidants.
Une problématique complexe
Or, selon M. Bélanger, la situation est d’autant plus complexe puisqu’on ne peut plus simplement rouvrir ces accès-là de manière débridée étant donné que le cadre législatif actuel n’est pas à jour. Présentement, il n’y a aucune réglementation qui limite la vitesse des bateaux, qui limite le nombre de bateaux ou qui vise à réduire l’impact sur l’environnement des embarcations. Il faut donc s’attaquer à ce renouvellement du cadre législatif tout en travaillant à améliorer les accès publics aux plans d’eau.
Ceci passe inévitablement par un recadrage du débat public selon la Fondation Rivières. Par exemple, M. Bélanger explique qu’il faut voir une rivière comme on voit les rues d’aujourd’hui en ville: une zone protégée pour les piétons, une zone pour les vélos et une zone pour les autos. Appliqué à une rivière, nous aurions une zone pour les nageurs, une zone pour les embarcations légères et une autre pour les bateaux à moteur. Comment y arriver? Afin que cette cohabitation soit possible et que le partage des cours d’eau soit amélioré, il faut changer les lois au niveau fédéral et provincial. Ces changements devront obligatoirement prendre en compte les impacts des activités sur la qualité de l’eau précise M. Bélanger. Plusieurs activités, qui ne sont actuellement pas réglementées, ont de graves impacts sur la santé des plans d’eau. On peut penser notamment aux bateaux pour faire du wakeboard qui créent de grosses vagues artificielles et qui peuvent accélérer dangereusement l’érosion des berges s’ils ne restent pas au centre du cours d’eau. Cette érosion à des conséquences désastreuses menant à la libération de phosphore, la création d’algues bleues et éventuellement au vieillissement prématuré du lac.
L’eau est-elle assez propre pour se baigner?
La qualité des plans d’eau du Québec s’est grandement améliorée depuis les 40 dernières années, au point où M. Bélanger affirme que c’est un mythe cette idée de cours d’eau impropres à la baignade! Le Québec s’est massivement doté de services d’assainissement des eaux qui ont grandement amélioré la qualité des milieux hydriques. Ce qui fait qu’à beaucoup d’endroits, l’eau est de très bonne qualité, pendant l’été. D’ailleurs, la Fondation Rivières suit la qualité de l’eau dans 51 lieux autour de Montréal depuis 20 ans et à trouvé qu’à 50 de ces endroits, l’eau est toujours bonne pour la baignade! À l’automne et au printemps c’est moins sûr puisque la principale source de contamination vient des déversements d’eau usés. L’eau est de meilleure qualité qu’on ne le croit, il faut se la réapproprier.
Comment bonifier l’accès public aux plans d’eau?
Pour les municipalités désirant ouvrir des accès pour la baignade, la première étape est de faire une évaluation de la baignabilité, soit de regarder s’il y a des risques, s’il y a un potentiel et quels seraient les protocoles pour la population. La Fondation Rivières accompagne d’ailleurs plusieurs municipalités dans ce processus.
Du côté de la population, pour faire pression auprès des gouvernements, on peut organiser ou participer au Grand Splash. Ces événements de réappropriation de nos cours d’eau servent à envoyer un message clair au gouvernement du Québec et, par le fait même, à mobiliser les municipalités pour qu’elles s’engagent également à lutter pour améliorer l’accès aux plans d’eau.